Paroles.
Il y en a tant. Avoir peur et craindre parfois, ce que l’on sent autour de soi.
Trop facile, je me dis, trop facile, ceux qui parlent pour avoir l’air, et qui s’accrochent à deux- trois livres de développement, des théories pour coacher. Amour, gloire et beauté.
Dans la postérité, ça passera pas. Une mode, je crois.
J’aimerais, si je le pouvais, leur proposer Dostoïevski, et du Beauvoir, et du Gary. Mais les mots d’aujourd’hui ne résonnent pas avec le lexique d’autrefois. Trop d’efforts, trop loin.
« Bouh, tu lis ça toi ! Un peu glauque dis ». Pas assez modernes, pas assez cool.
Les mots d’aujourd’hui sont généralistes, des mots trop gros, des mots-obèses et gras. Qui en eux ne portent ni exactitude, ni difficulté. Des mots à ingurgiter. Et à vomir.
Des mots pour raccourcir.
Pour vernir le tout on opte pour l’anglais. Camoufler l’ignorance, novlangue à outrance.
Vouloir combattre mais se sentir démuni. Comme si le monde était désarmé, derrière des écrans caché. Des écrans de fumée.
Oh. Je m’en fiche du grand parler, j’aime – moi aussi –jurer. Pauvre con, salaud, débile, connerie de merde et va te faire foutre. Oh oui, ça fait du bien ! C’est juste que… Du moment que cela soit honnête, voyez-vous ? Pas besoin de beaux mots. Pas besoin non plus de grands auteurs avoir lu. C’est pas ça. Non. Ce que je cherche ce sont des mots qui ne craignent ni vérité ni réalité.
Le monde du travail, celui qui fait gagner, je veux dire, là où pour survivre on va, ne permet plus, ou pas, d’utiliser mes mots, à moi. Trop taillés. Pas assez arrogants, pas assez flou.
Voilà, c’est cela. Flouer. Rendre indistincts ceux qui le méritent et ceux qui en avant parviennent à s’afficher. Ainsi sommes-nous Senior à trente ans. Et bizarrement, on semble contents ! Senior Manager. Senior Assistant. Senior Accountant. Senior Consultant. D’être vieux avant l’âge, de se lever chaque matin pour cet horizon-là.
« Moi, moi, moi, je suis ainsi, je suis comme ça. J’aime tout le monde et ça se voit.
Quoi, tu oses de lui dire ça ? La Pleine Conscience tu connais pas? Peace, love, et en avant. »
Mais en avant vers quoi, les gars ?
De temps en temps, oser. Exprimer le fond de sa pensée. Faire atterrir.
Suspendre la confusion, relâcher la pression. Dire : Non.
Brasser du vent, bien volontiers.
Avec mes bras, avec mes pieds.
Danser !
Sentir sur soi la liberté nous caresser.
Mais pas ma parole, pas ma fierté.
Ne pas en l’air les envoyer.
Non, celles-là, les roder et les penser.
Et face au monde les confronter.
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